Les pages d'histoire du 36e régiment d'infanterie

15 oct. 2009

La guerre, à en souper


(Ci-contre : un repas entre officiers et sous-officiers au 36e RI avant guerre. A droite, sous la croix rouge,  le sergent major Girard. Merci de me signaler le nom des soldats si vous les reconnaissez. Photo DR)

Sardines, pommes de terre, boîtes de "singe", chocolat, pain, confiture, vin, soupe froide, riz... A relire les témoignages, l'ordinaire du soldat, même complété par les colis de la famille, fut bien monotone. En témoigne, cette lettre d' Etienne Tanty, du 129e régiment d'infanterie, rédigée dans la plaine de Courcy, en novembre 1915. Dans une description très sarcastique, le jeune garçon raconte un repas pris dans un cantonnement, à proximité des lignes tenues par le 36e RI.

"Lundi 9 novembre (...) Les cuisines sont des foyers, un par escouade, le long d'un mur, entre le mur et un immense tas de fumier. Sur deux pierres chauffent une immense marmite de riz et une de pommes de terre en purée. Chacun s'amène avec sa gamelle et la distribution commence et, avec elle, l'inévitable chamaillerie : hé ! le riz est à l'eau ! – hé ! le riz est au gras – et je ne l'aime pas comme ci et je ne l'aime pas comme ça – et puisque c'est ça j'en veux pas – et c'est toujours les mêmes – et tu nous fais chi... – et viens voir un peu ! – oui j'y viendrai – qu'est–ce que t'attends – et cette gamelle est trop pleine – et celle–ci ne l'est pas assez ! – et ta gueule ! – sale râleur ! espèce de... – répète–le donc ! – oui je le répèterai – eh bien répète–le – tu vas voir ! – tu me fais pas peur, peut–être ! – voulez–vous taire vos gueules, là–bas ! – et patati et patata...
Quand les quatre ou cinq cuillerées de riz et de patates sont enfin distribuées, chacun tire son pain de sa musette et le dîner commence, les uns debout, les autres assis le long du mur, d'autres avec le tas de fumier comme table. Parfois de la politique et stratégie établissent une conversation, où l'on répète avec passion les pires âneries et les plus grosses balourdises des journaux. Les Boches fuient comme des lapins, les Russes sont à Berlin, la guerre va finir dans les huit jours ! Le dîner fini, c'est le tour du jus et les engueulades reprennent : "Et t'es déjà servi ! Et t'es pas servi ? Et t'as pris du rabiot ! Et t'en as pris !" Je vous fais grâce du reste, ce qu'on entend du matin au soir ! (...)"

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire