Les pages d'histoire du 36e régiment d'infanterie

9 août 2009

Le calice jusqu'à l'hallali

Après le combats du 5 juin, à Neuville-Saint-Vaast, les compagnies du 36e régiment d'infanterie présentent un niveau d'enchevêtrement et de désorganisation rarement atteint depuis le début des combats. Pour remettre un semblant d'ordre, les fractions d'unités survivantes sont regroupées provisoirement en deux groupements de combat : le groupement Voisin (qui rassemble les 3e, 4e, 6e et 8e compagnies, avec 3 sections de mitrailleuses) et Craplet (1re et 2e compagnies, une compagnie du 39e et une section de mitrailleuse).
Georges Chassery, le chef du 3e bataillon en réserve à la Targette – ce bon Chassery qui, quelques mois plus tôt, dans ses lettres du bois de Beaumarais à son épouse, était loin d'imaginer une telle férocité des combats –, est envoyé pour s'assurer si la liaison avec le 129e RI, à la droite du 36e RI dans le village, est effective. Il est précédé de deux de ses compagnies, la 11e et 12e compagnies, qui passent leur nuit à déblayer les maisons de leurs derniers soldats allemands. Les caves des maisons défoncées sont envahies de décombres sous lesquels on devine des corps humains. On combat à la grenade toute la nuit, plus particulièrement dans la maison à l'angle de la Grande Rue et de la rue Marron qui n'est pas enlevée. Quelques Allemands qui s'enfuient vers le nord du village sont abattus. Les fusées éclairantes envahissent le ciel et éclairent d'une lumière blafarde le village saccagé.
Les hommes sont épuisés. Les lignes de ravitaillement, pour certaines au départ de la Targette, sont régulièrement coupées par les bombardements. Les corvées du 28e territorial, peu encadrées, se débandent. Dans un compte rendu de fin de journée, le commandant Jèze du régiment rapporte le constat du chef de bataillon Voisin : "Mes hommes sont complètement abrutis. Il y a plusieurs cas de syncopes." De fait, le colonel Viennot, qui commande la 10e brigade, rédige le 6 juin un rapport au général Mangin, commandant la 5e division, dans lequel il demande : "1°Compte tenu des fatigues continuelles que mes troupes ont supporté depuis le 26 mai 2° Des pertes subies quotidiennement sous un bombardement continuel et qui ont atteint leur maximum au cours des affaires des 3, 4 et 5 juin, je suis dans l'obligation de vous déclarer que non seulement aucun élément de ma brigade n'est capable de coopérer actuellement à une offensive, mais encore que mes régiments sont dans un état tel que je ne puis assurer l'intégrité du front que j'occupe. En conséquence, je demande instamment d'être relevé dans le courant de la nuit prochaine (…)"
La suite de cette journée peut être lue dans le tome 3 des Armées françaises dans la Grande Guerre : "Le 6 au matin, le général d'Urbal rend compte au commandant du groupe provisoire du Nord que la fatigue et le mélange des unités dans Neuville s'opposent à la continuation immédiate des opérations. Le général Foch convoque immédiatement à Hermaville (quartier général du 20e corps) les généraux d'Urbal, Balfourier et Mangin ; après examen de la situation, il décide de poursuivre la lutte de jour et de nuit, jusqu'à la conquête entière du village."
Le lendemain, les boyaux sont réparés en prévision des attaques à venir, reportées au 8 juin. Différents détachements du régiment sont placés face à leurs objectifs : les ruines du groupe de maisons E1, les sites C3, C4 et C5 (au croisement de la rue Marron et de la rue Verte), et toutes les maisons le long de la rue Verte en direction de Souchez. (Ci-dessus, une carte intitulée "Combat de maison à maison à Neuville St Vasst". Merci à Victor Comettant pour cet envoi.)

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