Les pages d'histoire du 36e régiment d'infanterie

30 mai 2010

Gueule de bois à Soulains

Les bois de Soulains, ici à gauche, furent un des tombeaux
des Nordistes du 84e régiment d'infanterie, en 1914.
Il est impossible d'imaginer les abîmes de perplexité dans lesquels furent plongés les commandants Navel et Duchemin, chefs de bataillon du 36e et du 129e régiment d'infanterie, le 16 septembre 1914. De leur poste d'observation au château de Brimont, où les deux officiers supérieurs suivaient avec attention l'assaut des troupes depuis près de vingt-quatre heures, ils purent voir, en fin d'après-midi, des soldats français fuir les bois de Soulains devant les Allemands, et se réfugier à 200 mètres derrière la voie ferrée qui relie Reims à Laon, où un régiment d'artillerie français s'était retranché. Les Français ayant déserté ce petit bois, le dernier lien qui reliait les deux bataillons du château à leurs régiments venait de disparaître (voir cette carte)… Près de 1500 hommes se retrouvaient quasiment encerclés, sans espoir de ravitaillement, condamnés, à terme, à une capture par les Allemands.
Difficile, pour autant, d'incriminer les Avesnois du 84e régiment de cette débandade (selon toute vraisemblance, ces soldats en déroute appartenaient à cette unité). Arrivés avec le 1er corps d'armé à Reims le 12 septembre au terme d'une équipée qui a démarré, en Belgique, un mois plus tôt, ces hommes se sont battus à Dinant et ont soutenu le repli de l'armée du général Lanrezac. Engagés à Guise, ils sont de ceux qui chargèrent, dans le nuit du 29 au 30 août, sur la ferme de Louvroy, baïonnette au canon, à la lueur des meules de pailles incendiées. Ils ont enfin connu un véritable combat de rues à Châtillon-sur-Morin, le 6 septembre, où de nombreux officiers ont été mis hors de combat, dans une lutte parfois de maison à maison. Fatigués et exsangues, les compagnies du régiment durement éprouvées ont été complétées par des hommes du dépôt de la dernière classe de réserve. Mal équipés, ils présentent, selon l'aveu du commandant du 3e bataillon (retranscrit dans le JMO du régiment), un "esprit général médiocre". Ils sont pourtant engagés, dès le 14 septembre, pour appuyer une hypothétique attaque en direction du village de Brimont.
Dans la nuit, les combattants du 84e relèvent un autre régiment à la lisière sud des bois de Soulains, en liaison avec le 36e régiment. Le troisième bataillon du régiment d'Avesnes-sur-Helpe occupe l'est du bois, et détache, vers l'est, une compagnie sur la ferme Modelin. Mais avec le matin, les premiers obus de 77 et 105 accablent les combattants dans le bois. Les bataillons ne peuvent déboucher dans la plaine de Brimont tant celle-ci est battue par l'artillerie et les mitrailleuses allemandes. Pendant plusieurs heures, le 15 et le 16 septembre, le régiment essaie de résister à une forte attaque enveloppante de l'infanterie ennemie, accompagnée de mitrailleuses. Mais les Allemands, supérieurs en nombre, débordent les bataillons et infligent de nombreuses pertes, notamment dans l'encadrement des compagnies. Enfin, les contre-attaques des Avesnois sont reçues presque à bout portant par les mitrailleuses MG, obligeant les compagnies à se replier.
Ce sont donc des hommes accablés qui se réfugient derrière les lignes françaises et abandonnent les bois de Soulains le 16 septembre. Le 36e régiment d'infanterie, qui a évacué le bois vers midi, est rappelé en urgence. Car vers 16 heures, les Allemands, poursuivent leur attaque et lancent un assaut brusqué sur les lignes françaises établies aux cavaliers de Courcy, à l'ouest du bois...

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