Pourquoi ce blog et comment le lire ?

Cette page, qui n'a pas la prétention d'être exhaustive, est un hommage rendu aux hommes du 36e régiment d'infanterie que mon arrière-grand-père, Fernand Le Bailly, a côtoyés, parfois photographiés pendant la Première Guerre mondiale. Elle souhaite conserver et transmettre leur souvenir. Elle est conçue à partir de témoignages, d'écrits et d'archives personnels qui m'ont été envoyés, en partie par des descendants de soldats du 36e. Elle est aussi un prétexte pour aller à la rencontre d'"invités" – historiens, passionnés de la Grande Guerre, élus, écrivains... – qui nous font redécouvrir aujourd'hui ce titanesque conflit. Elle est enfin un argument pour découvrir tous les prolongements de ce gigantesque conflit dans le monde d'aujourd'hui.
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11 sept. 2008

Les deux guerres de Fernand Mathias

Quelques jours avant la contre-offensive générale du 18 juillet 1918, le 36e régiment d'infanterie exécute une opération couronnée de succès près d'Antheuil, dans l'Oise. Voici un petit texte transposé des souvenirs laissés par Fernand Mathias, adjudant-chef au 36e, qui a participé à cet engagement. Merci à Ghislaine Mathias et à la famille de Fernand Mathias pour leurs informations (Photos DR).

9 juillet 1968 - "Politique étrangère encore, 43 morts, 67 blessés, tel est ce bilan du bombardement de Suez effectué hier par l'artillerie israélienne..." La voix de Jacqueline Baudrier soliloque depuis quelques minutes à l'antenne de France Inter. Fernand Mathias ne l'écoute plus. Les yeux bleu-gris perdus dans le vague, l'homme s'abandonne aux images et à ses souvenirs qui reviennent invariablement pour ce jour anniversaire.
9 juillet 1968-9 juillet 1918. Il y a cinquante ans, pratiquement heure pour heure, alors qu'il était au 36e régiment d'infanterie, il était évacué d'Antheuil, dans l'Oise, le cou et le poumon perforés par une balle. Cinquante ans ! Un demi-siècle exactement. Que de chemin parcouru depuis sa mobilisation, en août 14, au 24e régiment d'infanterie. Un mois plus tard, il avait été blessé à Loivre d'une balle au pied. Soigné, il était venu regonfler les effectifs du 36e RI, en novembre 1915, décimé par les combats dans Neuville-saint-Vaast.
Cinquante ans. Comme chaque année, ses premières pensées retournaient immuablement vers ses camarades disparus sur les champs de bataille de Verdun, dans l'Aisne, dans les Flandres... Et vers cet étrange plateau lunaire, bordé par l'Aronde, où il avait échappé à la mort plus d'une fois lors de cet été 1918. Le 36e était arrivé le 10 juin dans ce secteur. Il revenait du mont Kemmel, en Belgique, le moral à l'étiage. En retrait de l'offensive Mangin, le régiment était resté vers Gournay, en bordure des marais, où le mot d'ordre était de "tenir et durer". Mais vers la fin du mois, les opérations et coups de main avaient repris. Le 22, Fernand avait facilité une incursion sur un PC allemand en attirant sur lui les feux de l'ennemi. Il y avait gagné une citation à l'ordre de la division. Et le 9 juillet, il avait récidivé en entraînant sa section à l'assaut de la ferme des Loges. On était loin des combats de 1914 la fleur au fusil ! Il fallait voir le matériel réuni : tanks, grenades incendiaires, avions, lance-flammes... En pleine nuit, une fois l'orage passé, ils avaient couru vers la ferme des Loges et l'avaient enflammée. Puis ils s'étaient battus, pratiquement au corps à corps, contre les ennemis organisés dans les talus du chemin creux. Fernand avait été blessé à ce moment-là. Soigné à Angoulême, il était revenu dans son régiment début août et avait participé à la "poursuite finale".
A la démobilisation, après sept années sous les drapeaux, Fernand avait retrouvé une activité dans les chemins de fer dans la région rouennaise. Il aurait pu, comme beaucoup, se sentir écrasé par ces années de souvenirs sanglants. Il n'en avait rien été. Cette guerre se terminait. Une nouvelle démarrait, cette fois pour son village normand, Alizay, dans l'Eure. Il s'était distingué, là encore, par quelques "hauts faits" : ses trois mandats de maire (1953, 1959 et 1965), l'extension industrielle du bourg après la Seconde Guerre mondiale, la sérénité retrouvée de ses habitants, l'implantation de la Société industrielle de cellulose en 1954, la visite de Nikita Khroutchev... Et puis il y a avait sa femme Augustine, qui avait été sa "marraine de guerre" : le 19 octobre prochain, presque un mois avant le cinquantenaire de l'armistice, ils allaient fêter leur jubilé de vie commune. Décidément, la fin de cette année allait être chargée !

4 commentaires:

  1. monsieur, j'ai découvert par hasard ce site et permettez moi de vous féliciter pour le travail remarquable, précis et passionnant de cette quête d'un passé si tragique. Cet hommage à ces hommes qui se sont sacrifiés est bouleversant et se lit comme un roman.
    continuez je viens sur votre site comme si j'allais au cinéma avec joie et envie.

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  2. Merci beaucoup pour vos compliments. Cet hommage, je l'espère, ne va pas se terminer de sitôt. La séance va continuer...

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  3. un compliment, un encouragement, une poignée de main, une médaille, une accolade pour votre travail et l'émotion du souvenir que l'on ressent à la lecture de votre blog. Bravo.

    Malo

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  4. Je prends tout, mais je laisse la médaille ! Merci à vous

    Jérôme

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