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La mémoire de Roger Couturier, soldat du 36e régiment d'infanterie, ne se découvre plus aujourd'hui que par bribes. Son épitaphe* figure encore peu ou prou sur son tombeau, dans le petit cimetière parisien de Passy (divison 8), à quelques pas de la tombe de Maurice Genevoix et du colossal monument de Paul Landowski sur la Grande Guerre. Et son patronyme orne enfin une des plaques qui évoque les 546 écrivains "représentants de la pensée française morts pour la patrie", apposées de chaque côté du choeur du Panthéon de Paris. Autant dire que le souvenir de ce jeune garçon est bien ténu. Et sans le travail de sa mère, Geneviève Couturier, qui, en 1915, entreprit de recueillir et publier le journal et les lettres que son fils lui adressa de la fournaise, dans un petit ouvrage intitulé Un soldat de la Grande Guerre, on serait bien en peine d'invoquer ce jeune garçon, mort à dix-sept ans à Neuville-Saint-Vaast.
Né le 15 octobre 1897, Roger Couturier appartient à une famille aisée. Il grandit dans l'ouest parisien et, à l'âge de 8 ans, se voit admis au collège des pères maristes de Passy. "D'une grande timidité, d'une extrême sensibilité", selon sa mère, l'enfant se tient à l'écart des autres. Sa mauvaise santé contraint ses parents à l'éloigner de la capitale. En 1907, il est placé à l'institut Saint-Vincent de Senlis, où l'adolescent reste deux ans. De retour à Paris, il passe la première partie du bac philosophie. Profondément croyant, grand admirateur d'Albert de Mun, il est tenté par le sacerdoce, mais la déclaration de guerre bouleverse ses plans. Il veut s'engager. Son père mobilisé, il se retrouve seul avec sa mère.

Il part le 9 janvier à Caen, et après quelques jours passés au dépôt du régiment, il est envoyé à Potigny, où la classe 1915 a déjà commencé son instruction. Elève caporal, il passe les épreuves et repart pour le dépôt le 19 avril, où il endure la vie de caserne. Il fait mettre son nom sur la liste des partants pour le bataillon de marche, mais celui-ci est retiré, au prétexte qu'il est trop jeune. Enfin, le 18 mai, il apprend son départ pour le front. Lors de son voyage, le 20 ami, il se lie d'amitié avec le "lieutenant E..." (Roland Engerand, fils de Fernand Engerand - député du Calvados -, qui a été blessé au mois de septembre, à l'attaque du fort de Brimont, près de Reims).
* "Ici repose Roger Marie Couturier, engagé volontaire au 36e d'infanterie, tombé glorieusement à Neuville-Saint-Vaast, le 23 juillet 1915 à l'âge de 17 ans et demi. Médaille militaire et croix de guerre."
(A suivre...)