Pourquoi ce blog et comment le lire ?

Cette page, qui n'a pas la prétention d'être exhaustive, est un hommage rendu aux hommes du 36e régiment d'infanterie que mon arrière-grand-père, Fernand Le Bailly, a côtoyés, parfois photographiés pendant la Première Guerre mondiale. Elle souhaite conserver et transmettre leur souvenir. Elle est conçue à partir de témoignages, d'écrits et d'archives personnels qui m'ont été envoyés, en partie par des descendants de soldats du 36e. Elle est aussi un prétexte pour aller à la rencontre d'"invités" – historiens, passionnés de la Grande Guerre, élus, écrivains... – qui nous font redécouvrir aujourd'hui ce titanesque conflit. Elle est enfin un argument pour découvrir tous les prolongements de ce gigantesque conflit dans le monde d'aujourd'hui.
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22 janv. 2011

Retiens l'ennui

En décembre 1915, Fernand le Bailly trompe sans doute la morosité
en se promenant autour de l'église de Chaudardes, mais il échappe,
de peu, à un obus de 77 qui écrase une tombe à proximité.
Avril 1915. A Beaumarais, les jours passent et se ressemblent. Côté Français, les patrouilles et reconnaissances se succèdent avec un mot d'ordre renouvelé : "faire le plus de mal à l'ennemi au moyen de bombes, fusils de chasse et de détruire (ses) défenses accessoires". Hormis l'ennemi, accroché aux contreforts du plateau de Craonne, il est difficile de ne pas imaginer les Normands aux prises avec un bien plus terrible ennemi, insaisissable et mystérieux, l'ennui. Pour combattre ce mal inconnu, les soldats s'occupent comme ils peuvent dans leurs abris pouilleux, entre deux courts sommeils de quelques heures : manger, écrire au pays, astiquer son fusil... Un article paru dans la rubrique "Notre Courrier", de l'hebdomadaire Le Bonhomme Normand, "journal des événements, bruits, et nouvelles du Calvados, Orne, et Manche", en date du 23 avril 1915, évoque, parfois avec condescendance, cette lassitude.

"NOTRE COURRIER
"Ce n'est pas en vain, nous le savons, que nous faisons appel à la générosité de nos lecteurs et nous n'hésiterons pas à y recourir parfois encore, en y mettant toute la discrétion voulue, lorsque ceux pour qui nous solliciterons sembleront vraiment dignes d'intérêt. Voici par exemple, une demande émanant d'un caporal du 36e, nous la transmettons avec empressement.
Monsieur le Directeur,
Ne pourriez-vous publier dans vos colonnes quelques mots destinés à ceux de vos lecteurs qui voudraient bien disposer, en notre faveur, de quelques jumelles de théâtre ?
Les donateurs nous rendraient, à mes camarades et à moi, un signalé service, car beaucoup d'entre nous, peu fortunés et ne touchant pas, comme les officiers et sous-officiers, la prime de guerre, ne peuvent se procurer cet indispensable instrument qui nous permet à nous, chefs de patrouille, de sauver de nombreuses et précieurse existences.
Dans l'espoir que vous donnerez satisfaction à notre demande.
Veuillez agréer nos remerciements sincères.
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"C'est ensuite une autre lettre, d'un simple soldat du même régiment, cette fois, et, tout naturellement, elle nous fait part d'ambitions moins hautes.
Monsieur,
Etant dans un bois situé dans une certaine région et n'ayant aucune facilité pour pouvoir nous procurer quelques distractions, bonnes à faire passer le temp, je vous serais bien reconnaissant de vouloir bien nous envoyer, si cela est possible, quelques jeux de cartes ou quelques illustrations de façon que l'on puisse se distraire à son gré, pendant que les Boches nous enverront des marmites, chose qui n'a aucune influence sur le moral de tous les soldats de notre régiment. Veuillez agréer, à l'avance, M. le directeur, l'assurance de mes remerciements.
"Vous voyez ce que nous demandent ces braves enfants : des images pour passer le temps, des jeux de cartes pour faire une manille, une paire de jumelles pour dépister l’ennemi et leur aider à sauver leur peau... Nous n'insistons pas, on nous a compris. Si, comme nous l'espérons, nous recevons quelques-uns de ces objets, nous les transmettrons aussitôt à leurs heureux destinataires.
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Il paraît que la privation de lectures, c'est ce dont nos "Bonshommes" souffrent le plus.Tous réclament des livres et des journaux, à preuve cette autre lettre :
Monsieur le directeur,
Voulez vous bien permettre à un lecteur assidu, en temps de paix,, du Bonhomme Normand, de vous demander une petite faveur. J'habite Colleville-sur-Orne et, depuis le mois d'octobre, je suis dans les tranchées, ainsi que beaucoup de camarades normands. Pendant les quelques jours de repos que nous prenons en arrière des ligne, bien souvent nous nous ennuyons. Il nous faudrait quelque chose à lire, c'est ce qui nous manque le plus. Si quelquefois vous pouviez nous envoyer quelques brochures, cela nous ferait plaisir. J'espère que vous voudrez bien prendre ma demande en considération, et je vous prie d'agréer, etc."

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